12 septembre 2023

Nouveau podcast MécaSphère : Emmanuel Brugger, Cristel

L’épisode 12 de « MécaSphère, le podcast de la communauté industrielle » donne la parole à Emmanuel Brugger, DG de la société Cristel (adhérent Synetam). Il explique comment il a modernisé la production de ses produits tout en réduisant l'impact environnemental et partage sa vision holistique du monde considérant l'environnement et l'humain comme une seule et même chose. Emmanuel Brugger met en avant l'importance de remettre les finances au service du développement humain pour créer un monde meilleur. « Ce qui me fait vibrer, c'est d'aider les autres, de trouver des solutions pour le plus grand bien du plus grand nombre ».

C’est à découvrir et à partager ici !

Retranscription du podcast :

Emmanuel Brugger, je suis directeur général de la société Cristel. Une société qui fabrique des articles culinaires haut de gamme. Je suis né d'une famille modeste. Mes parents étaient agriculteurs. J'ai vécu à Besançon pendant de nombreuses années. Ensuite, j'ai fait un IUT de génie mécanique et de productique. J'ai rencontré ma première épouse, on était animateur dans une colonie de vacances et en fait ses parents qui étaient les patrons de la société Cristel m'ont proposé de travailler pendant les vacances scolaires en ligne de fabrication. Ce que j'ai accepté. Ensuite, on m'a proposé d'autres missions et je suis devenu assistant de recherche et développement, ingénieur, directeur technique et directeur général depuis 2006. Je me suis vraiment investi dans cette entreprise parce que je me retrouvais sur des valeurs humaines et environnementales qui sont des valeurs fondamentales pour moi.

Des exemples ? Ça pourrait être quand on a modernisé tout l'outil de production. J'avais un périmètre technique pour la rénovation des installations et le changement complet de l'ensemble de l'outil de production, et j'ai apporté une dimension supplémentaire pour aller un peu plus loin au niveau environnemental, pour trouver des solutions qui permettent d'avoir moins d'incidence sur l'environnement. Un autre exemple en 2007, on a fait le choix d'avoir un approvisionnement électrique qui était issu de sources renouvelables. Ça ne se voit absolument pas dans le produit fini. Par contre, on a un surcoût et on a fait le choix de le passer à 100 % simplement par conviction environnementale. Un des derniers gros investissements qu'on a fait qu'on a fait en la matière, c'est la récupération de la chaleur fatale. C'est-à-dire que sur certaines installations, on doit chauffer nos installations jusqu'à 450 degrés et donc on a trouvé une solution avec une start-up qui, elle, récupère la chaleur issue des installations et des process de fabrication pour en faire soit de l'électricité, soit de l'air comprimé. Un des gros utilisateurs d'air comprimé dans notre process de fabrication, c'est le sablage des ustensiles avant le dépôt du revêtement. On a donc des compresseurs et ces compresseurs génèrent eux-mêmes une chaleur importante. Donc ce que l'on fait, c'est que 6 à 7 mois dans l'année, en fait, on chauffe 60 % de la surface de production avec de la chaleur qui est issue des compresseurs, ça coûte rien et ça économise une quantité de gaz absolument fabuleuse. Je ne comprends pas pourquoi tous ceux qui ont un compresseur n'ont pas cette solution-là, parce que c'est d'une simplicité déconcertante.

On a l'habitude de jeter nos poêles quand le revêtement est usé. C'est comme si on changeait de voiture à chaque fois que les pneus sont usés. C'est une aberration. Quand on propose un rechapage pour le tiers du prix du produit neuf. C'est un produit neuf qu'on ne vendra pas à la place. Et pour autant, on a plutôt l'impression d'être cohérent avec nos valeurs et avec la préservation des ressources, avec le bien-être au travail, avec tout ce à quoi on croit. Quand on vend un produit qui est fait de cette manière-là, on a le sentiment de mettre entre les mains d'une personne un produit qu'il va utiliser pendant toute sa vie. Et ça donne du sens à notre engagement.

Mais ça donne du sens aussi vis à vis de la situation climatique que l'on est en train de vivre et qui fait qu'on est aujourd'hui dans l'obligation de se reposer la question de chacun de nos gestes, de nos gestes du quotidien, mais de nos gestes de consommateurs, de nos gestes de parents, de nos gestes d'employeur, de nos gestes à tous les stades.

Pour moi, l'environnement et l'humain, au sens habituel du terme, ce n'est qu'une seule et même chose puisque quand on prend soin de notre environnement, on prend soin bien évidemment de la planète, des conditions dans lesquelles on va vivre, et donc de l'humain qui est derrière. Alors ça implique parfois des contraintes au niveau de l'humain mais ça veut dire que dans les décisions que l'on prend, le premier des critères, c'est bien évidemment la pérennité de l'entreprise mais tout de suite en parallèle c’est est-ce qu’on est en adéquation avec le fait que la décision que l'on prend ici et maintenant est conforme à la pérennisation des ressources, au bien-être de l'humanité, cetera, et cetera ? Il y a juste à remettre les finances au service du développement humain au service de l'humanité, de l'environnement et du développement des entreprises.

Quand on n'arrive pas à se mettre tous d'accord individuellement sur les mesures qui sont à prendre pour respecter l'environnement, pour limiter l'incidence du changement climatique et autres, il faut à un moment donné que le gouvernement, que le régulateur, que l’Europe que peu importe nous disent voilà, c'est comme ça qu'il faut faire et c’est à cet endroit-là qu'il faut aller.

Ce qui me fait vivre, ce qui me fait me lever le matin, ce qui me fait vibrer, c'est d'aider les autres, de trouver des solutions pour le plus grand bien du plus grand nombre. J'œuvre dans l'entreprise avec cette résonance-là, avec cette volonté-là. Et donc, quand je suis dans la sphère privée, dans la sphère personnelle, je m'alimente avec ma famille, je m’alimente avec mes amis et je m’alimente aussi, avec quelques lectures spirituelles qui vont de Teilhard de Chardin à plein d’autres, qui sont pour moi des référents en la matière et qui donnent un sens à ma vie. C'est-à-dire qu'est-ce que l'on fait sur cette terre, ici et maintenant ? Qu'est-ce qu'on a à y apporter ? Qu'est-ce qu'elle nous donne en retour ? Quelle est l'harmonie entre tous ces êtres individuels et toutes ces démarches spirituelles ? Je suis ingénieur de formation, j'ai la tête carrée et j'ai besoin de comprendre les choses qui m'entourent.

J'ai besoin d'expliquer, de mettre des mots sur des concepts qui sont, pas sensibles, mais en tout cas subtils. Et donc toute cette démarche spirituelle m'a amené notamment à regarder ce qui se passe du côté de la physique quantique, ce qui se passe sur les énergies telluriques, pour trouver des mécanismes cartésiens derrière des choses en apparence assez fumeuses, mais qui ne le sont en fait pas du tout. On sait expliquer beaucoup de choses. Les champs telluriques, on les explique parfaitement bien sur le noyau de la terre qui est liquide, qui engraine différemment du sens de la terre, les baguettes de sourcier, on les explique aussi. Et la physique quantique est en train de rejoindre une partie de ce que l'on dit être subtile aujourd'hui, qui nous ouvre une porte de compréhension de notre monde qui est à un autre niveau que nos cinq sens habituels.

Et j'ai eu dans mon parcours personnel à côtoyer la mort à plusieurs reprises pour des êtres chers, ma première épouse, ma mère, mon frère. Ce sont des épreuves qui amènent forcément, à se demander ce qui se passe après, si tant est qu'il se passe quelque chose ou pas, à se demander s'il y a autre chose que ce que l'on perçoit par nos cinq sens. S'il y a quelque chose, à quoi, ça rime ?

Et c'est aujourd'hui une de mes plus grandes passions. C'est cette dimension-là, aujourd'hui, que je cherche à développer à titre personnel et qui nourrit dans l'entreprise toute une démarche justement de bien-être et de bien-être qui va au-delà du fait du simple tapis anti-fatigue pour améliorer les conditions de travail. C'est créer un environnement bienveillant, non pas pour se substituer à la volonté, à la capacité de chacun et de chacune à choisir son libre-arbitre, je ne veux pas le bien à la place des autres. Je propose des solutions de bien-être libre à chacun de les choisir ou de les refuser. Pour moi, quand quelqu'un a une réaction démesurée à une situation de la vie courante, c'est que derrière, il y a une souffrance. Je ne suis pas psychologue et pour autant, quand les gens sont prêts à entendre, je le dis avec beaucoup de précautions, quand je vois une réaction disproportionnée, je dis : « Mais tu te rends compte de la réaction que tu as par rapport au fait que c'est juste un courrier qui part avec 24 h de retard ? Qu'est-ce qui fait que juste un retard de 24 h sur un courrier par exemple ou sur un mail te met dans cet état-là ? Quelle est la souffrance derrière ? »
Je dis à la personne qui est en face de moi « je ne dis pas ça pour que tu m'apportes une réponse. Je ne veux pas entendre la réponse. Je dis ça pour que toi, tu te poses la question et que tu recherches la cause, que tu apaises cette cause pour que la prochaine fois que tu es dans cette situation-là, tu ne souffres pas ».
Je fais ça avec toutes les personnes, toutes les situations que je constate, qui sont de cet ordre-là et le retour, que j'ai de l'expérience, de cette dimension-là dans l'entreprise est très enrichissante justement, sur mes démarches personnelles et spirituelles. J'ai une conviction profonde qui consiste à penser que le sourire que l'on a quand on fabrique un produit se ressent quand on l'utilise. Plus on va avoir de bien-être au travail, plus on va avoir d'harmonie au travail, plus on va générer des objets qui, eux, seront valeureux mais valeureux, avec un grand V pour le bien-être de l'humanité.

On est entreprise à mission. La société Cristel est entreprise à mission et la phrase qui revient sans arrêt, qui résume un peu tout ça, c'est « cuisinons ensemble un monde meilleur ». On ne va pas juste au travail pour ramener un salaire, mais on va au travail pour s'épanouir. Et à cet endroit-là, l’avenir de Cristel, je le vois comme étant une continuité du sens de la vie des 100 personnes, des 100 familles qui en vivent aujourd'hui, directement et puis des autres qui en vivent indirectement pour qu'on puisse encore une fois avoir un épanouissement global au travers d'un produit qui lui aussi, va donner du plaisir. Le plaisir du partage, le plaisir du goût, le plaisir du moment que l'on passe quand on cuisine, le plaisir de l'utilisation du produit, tous ces plaisirs-là.

Le futur de Cristel est là. Il est de continuer à être, à œuvrer pour le bien-être de l'humanité, à notre humble mesure. Je n'ai connu que la société Cristel, ce qui est une force et une faiblesse. Une force parce qu'il y a parfois, quand on ne sait pas comment se passe chez les autres, on ne se pose même pas la question. Et puis il y a d'autres fois où on réinvente le fil à couper le beurre, alors que d'autres l'ont déjà fait, d’où l'importance d'avoir des réseaux. Les réseaux ça va être bien évidemment la FIM qui est un canal très important d'apport de richesses et d'enrichissements sur des partages d'expériences qui sont du temps gagné pour l'entreprise.
Ça va être notre syndicat professionnel aussi, le SYNETAM qui lui, nous permet de mutualiser, notamment, entre autres, sur des thématiques comme le réchauffement climatique et partager les bonnes pratiques entre pairs sur comment on a évité cet écueil, comment on se prépare à cette situation, comment on réduit notre incidence environnementale, comment on améliore les conditions de travail, comment on passe d’un produit jetable ou moins pérenne à un produit durable. Et puis ce sont tous les autres réseaux, que ce soit l'APM, le CJD, les chambres de commerce et autres qui sont des viviers de bonnes idées. Comme je dis, ce sont des auberges espagnoles. Quand chacun le voit comme ça, on vient avec une idée et on repart avec autant d'idées qu'il y a de personnes présentes.

Donc ça, c'est un temps gagné infini. On reçoit énormément de scolaires de tout âge. C'est madame Dodane, présidente de Cristel, qui assure ces visites. Elle va expliquer l'intérêt de se dépasser, de s'épanouir dans l'entreprise. Tous les métiers qui existent et va insuffler la confiance aux personnes, dans les scolaires, dans les enfants, dans les jeunes qui sont là.
Et je peux vous dire qu'ils repartent très différents de ce qu'ils sont. Quand ils arrivent, ils ont comme je dis, les bras qui traînent par terre, ils sont découragés sur plein de choses et quand ils repartent, ils ont des étoiles dans les yeux en se disant : « C'est vrai que j'ai ma vie entre les mains. C'est moi qui choisirais la vie que je vais avoir et, potentiellement, l'industrie est une solution pour mon épanouissement personnel. »
Pour nous, c'est important d'avoir cette démarche-là, cet engagement-là, même si ça prend beaucoup de temps parce qu'on ne fait pas payer nos visites pour autant. C'est indispensable parce qu’encore une fois, dans le « Cuisinons ensemble, un monde meilleur » qui est notre base de ralliement, on a donné à chacun la possibilité de grandir.

Et quand vous avez un enfant, un adolescent qui repart de l'entreprise en croyant en lui-même, c'est un cadeau juste merveilleux. Vous vous dites, mais ça veut dire que nous, Cristel, avons contribué à épanouir et à donner un peu de lumière supplémentaire sur le chemin de ces personnes-là et c'est le plus beau des cadeaux. Et c'est pour ça qu'on se lève le matin et c'est ça qui donne un sens à notre vie. C'est de l'altruisme, mais c'est de l'altruisme au sens où on se dit, on est tous sur la même planète, on est tous au même endroit. Avançons ensemble à cet endroit.

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Mecallians est la banière commune des industries mécaniques, créée à l'initiative de la FIM, du CETIM, de l'UNM, de Sofitech et de Cemeca.